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Writer and Journalist

Comment la COVID-19 a rendu la vie des travailleurs migrants plus dangereuse

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Les conditions de vie et de travail des travailleurs migrants sont souvent dangereuses. La crise sanitaire a encore aggravé cette situation.

 

On estime à 164 millions le nombre de travailleurs migrants dans le monde. Cette main-d’œuvre occupe certains des emplois les plus précaires. Dans de nombreux pays, les travailleurs migrants comblent d’importantes pénuries dans des secteurs clés tels que les soins de santé ou l’industrie manufacturière, et exercent des tâches difficiles, précaires et dangereuses. De ce fait, ils sont déjà exposés à un risque de lésion et de décès plus élevé que les travailleurs nés dans le pays. Chaque année, des dizaines de milliers de migrants meurent en travaillant à l’étranger.

Les données exactes sur les risques professionnels encourus par les travailleurs migrants et sur le nombre de migrants qui décèdent en travaillant à l’étranger sont très rares. Pour combler ce manque d’informations complètes, un nouveau rapport de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) procède à un examen initial des sources de données disponibles sur les décès de travailleurs migrants. Il souligne en outre l’importance de recueillir des données exactes – y compris sur le contexte général des incidents mortels – et de notifier ces données conformément aux normes internationales.

Rôles essentiels, risque accru

La COVID-19 a exacerbé les risques auxquels sont exposés les travailleurs migrants. Beaucoup d’entre eux exercent des fonctions essentielles dans l’agriculture, l’hôtellerie, les soins de santé, la construction et la vente au détail de produits de première nécessité, ce qui signifie qu’ils ont moins de possibilités de travailler à distance et qu’ils risquent davantage d’être exposés au virus. Dans les pays de l’Union européenne, par exemple, les travailleurs migrants (en particulier ceux qui sont originaires de pays non membres de l’UE) sont surreprésentés dans les secteurs des soins à la personne, de la livraison/du transport et de la transformation des produits alimentaires, où les emplois nécessitent peu de qualifications formelles et/ou sont faiblement rémunérés.

Le secteur de la santé ne fait pas exception. Dans les pays de l’OCDE, près d’un quart des médecins et 16 % des infirmiers sont des migrants. Dans les pays d’Europe de l’Ouest, en Israël, en Australie et aux États-Unis, les travailleurs migrants représentent une part importante des personnels de santé, qu’ils soient hautement ou faiblement qualifiés, y compris les infirmiers, les médecins, les chirurgiens, les aides-soignants à domicile et les infirmiers auxiliaires.

Par conséquent, de nombreux travailleurs migrants sont extrêmement exposés à la COVID-19. En mai 2021, l’Organisation mondiale de la Santé estimait qu’au moins 115 000 professionnels de santé étaient décédés de la COVID-19. Beaucoup d’entre eux étaient des migrants, qui sont morts loin de chez eux et de leur famille.

Précarité économique 

Les conditions sont précaires également dans d’autres secteurs, où les travailleurs migrants risquent davantage de travailler sans protection appropriée, voire de se sentir obligés de vivre et de travailler dans des conditions dangereuses.

Durant la pandémie, de nombreux travailleurs migrants, en particulier ceux vivant sur leur lieu de travail, étaient dans l’impossibilité de respecter la distanciation sociale en raison de la suroccupation des logements de migrants et de la probabilité accrue de vivre dans la pauvreté.

Cette situation est aggravée par l’instabilité de l’emploi parmi les travailleurs migrants faiblement rémunérés, qui pousse les individus à travailler dès qu’un emploi est disponible, même si eux-mêmes ou leurs collègues sont malades.

Des études de l’OCDE ont fait apparaître que, dans plusieurs pays, le risque de contamination par le virus de la COVID-19 était deux fois plus élevé parmi les travailleurs migrants que parmi les travailleurs nés dans le pays. Cependant, de nombreux travailleurs migrants ont dû mettre en balance le risque de tomber malade au travail et celui de perdre leur emploi ou leur revenu.

Une étude menée par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et le PAM en novembre 2020 a révélé que de nombreux travailleurs migrants n’avaient pas été payés depuis le début de la pandémie (même s’ils avaient travaillé durant les confinements), avaient perçu des salaires réduits, ou avaient été renvoyés sans avoir touché la totalité de leur salaire. D’après cette étude, les migrants sont souvent les premiers à être licenciés et sont généralement exclus des systèmes de protection sociale.

Une étude de 2020 sur les travailleurs migrants des pays du Golfe a montré que la peur de tomber malade et de ne pas pouvoir travailler était à l’origine de plusieurs suicides.

Les restrictions de voyage exacerbent les vulnérabilités existantes

Ces difficultés sont encore aggravées par le fait qu’il n’a jamais été aussi difficile pour les migrants de rentrer chez eux à cause des restrictions de voyage liées à la COVID-19.

En raison de la nature extrêmement dynamique de la pandémie de COVID-19, il est impossible d’évaluer le nombre exact de migrants qui se sont retrouvés bloqués et incapables de rentrer chez eux. D’après des données publiées en juillet 2020, ils étaient au moins 2,75 millions, et ce chiffre a sans doute fortement augmenté.

Beaucoup de migrants bloqués n’ont pu satisfaire leurs besoins immédiats en matière de nourriture et autres produits de première nécessité. Au Liban, l’OIM a signalé que de nombreux migrants se sont retrouvés sans emploi, sans ressources et sans abri à cause de la COVID-19. À la fin de juin 2020, quelque 10 000 migrants avaient sollicité l’aide de l’Organisation pour rentrer chez eux.

Une question de vie ou de mort

Il n’existe pas de base de données unique qui montre l’impact de la pandémie sur les taux de mortalité parmi les travailleurs migrants, mais diverses sources portent à croire que ces taux sont plus élevés que chez les travailleurs nés dans le pays.

En Californie, des données sur les décès dus à la COVID-19 au sein de la population en âge d’activité font apparaître que près de la moitié des décès concernent des Latino-américains, alors que ceux-ci représentent environ 35 % de la population totale. Une étude nationale a également montré que les taux d’infection par la COVID-19 et de décès des suites de cette maladie ont été plus élevés parmi les Latino-américains nés à l’étranger et non ressortissants que parmi les autres populations des États-Unis.

Au Royaume-Uni et aux États-Unis, les statistiques sur la mortalité par appartenance ethnique font apparaître des taux de létalité plus élevés chez les personnes appartenant à des minorités ethniques, qu’elles soient nées à l’étranger ou dans le pays, que chez leurs homologues blancs.

Pour les familles des migrants qui meurent à l’étranger, les conséquences peuvent être dévastatrices. Le processus de deuil peut être compliqué par des obstacles linguistiques, des frais de rapatriement élevés et la difficulté à obtenir des réponses sur les circonstances de la mort de l’être cher.

Pour beaucoup, les conséquences financières peuvent être catastrophiques. Le PAM estime que les rapatriements de fonds des migrants – qui s’élevaient officiellement à plus de 700 milliards de dollars É.-U. en 2019 - permettent de faire vivre 800 millions de personnes dans le monde. Dans les pays où intervient le PAM, l’onde de choc provoquée par la pandémie de COVID-19 pourrait faire basculer dans l’insécurité alimentaire aiguë au moins 32,9 millions de personnes, privées des fonds envoyés par les membres de leur famille travaillant à l’étranger.

Dans ce contexte, il est vital d’améliorer les droits et protections des travailleurs migrants, conformément aux recommandations du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Les conditions de travail des migrants ont souvent été précaires, mais la crise sanitaire a souligné l’urgence d’un engagement mondial en faveur des droits des travailleurs et de la sécurité sur le lieu de travail pour tous les travailleurs, y compris les migrants.

Le présent article s’inspire largement du rapport intitulé Occupational Fatalities among International Migrant Workers. 

 


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